Ministre de la Santé, Prof. Moustafa MIJIYAWA

Le ministère de la santé dirigé par le Prof. Moustafa MIJIYAWA vient de mettre à la disposition du public togolais le bilan des 5 premiers mois de contractualisation du CHR d’Atakpamé. Un bilan positif qui incite l’extension de l’approche contractuelle aux autres formations sanitaires. Notons que cette contractualisation repose sur une délégation de la gestion des centres de soins à une société non étatique pour un meilleur rendement et efficacité.

 

Approche contractuelle dans les formations

sanitaires publiques du Togo :

bilan de cinq mois au CHR d’Atakpamé (Téléchargeable en .pdf)

 

Pr Moustafa MIJIYAWA

Ministre de la santé et de la protection sociale

 

Depuis des années, des investissements sont  effectués par l’Etat dans le secteur de la santé, aussi bien dans les infrastructures, les équipements que dans la formation. Parallèlement, on enregistre un développement impressionnant et continu du secteur privé formel  et surtout informel de soins. On observe également, l’apparition d’ONG de plus en plus nombreuses, l’implication des communautés, celle des entreprises, et la présence des collectivités locales en tant qu’acteurs publics, avec de nouvelles responsabilités qui leur sont confiées.

 

Cependant, un important fossé sépare les ressources certes limitées injectées dans le secteur d’une part, et les performances des formations sanitaires d’autre part. Ce hiatus, né d’une défaillance de gestion et traduit par une désaffection de la population pour les centres publics de soins,  a conduit le Gouvernement  à mettre sur pied une réforme du mode de gestion de ceux-ci, fondée sur l’approche contractuelle.

 

La contractualisation repose sur une délégation de la gestion des centres de soins à une société non étatique, assortie des conditions suivantes :

 

  • la société contractante est chargée de mettre en place des mécanismes et des outils d’une gestion orthodoxe dans la formation sanitaire ;
  • la formation sanitaire garde son statut public ;
  • le traitement et les motivations des agents relèvent de l’Etat, de même que l’achat, la maintenance et l’entretien des équipements ;
  • les frais des prestations, des soins, et de examens restent fixés par l’Etat ;
  • la société contractante n’aura à injecter ni ressources financières, ni équipements dans la structure objet de contractualisation ;
  • la société contractante sera rémunérée sur la base des prestations de gestion par elle dispensées ;
  • la société contractante s’insère dans l’organigramme existant de la formation sanitaire, et travaille de concert et de façon absolument transparente avec la direction et les agents de celle-ci.

 

La réforme comporte deux phases :

 

  • la phase pilote avec trois formations issues des trois  niveaux de la pyramide sanitaire : le Centre Hospitalo-Universitaire Sylvanus Olympio (CHU-SO) de Lomé pour le niveau central, le Centre Hospitalier Régional (CHR) d’Atakpamé pour le niveau intermédiaire, et le Centre Hospitalier Préfectoral (CHP) de Blitta pour le niveau périphérique ;
  • la phase d’extension progressive aux autres formations sanitaires publiques du Togo devra s’inspirer des leçons tirées de la première phase.

 

La phase pilote a été l’objet d’un lancement technique le 14 juin à Atakpamé et à Blitta. Elle est mise en œuvre depuis le 15 juin 2017 dans ces deux formations sanitaires. Nous dressons ici le bilan des cinq premiers mois de l’approche contractuelle au CHR d’Atakpamé.

 

1 – Le cadre et la méthode :

Le CHR d’Atakpamé, établissement public à caractère administratif, dessert 12 districts et une population de 1.572.241 habitants répartie sur une superficie de 16.975 km². Vingt-sept médecins exercent dans les formations sanitaires publiques de la Région des Plateaux dont Atakpamé est le chef-lieu. Le CHR d’Atakpamé  a une capacité de 215 lits et un personnel composé de 236 agents dont 7 médecins, 79 paramédicaux, et 150 agents administratifs et d’appui. Cent neuf des 236 agents (46%) émargent sur le budget autonome, avec une masse salariale mensuelle de  18.698.409 FCFA.

 

2 – Les mesures induites par la contractualisation :

La contractualisation, mise en œuvre à partir du 15 juin 2017, comporte  sept axes :

 

  • la gestion des ressources humaines ;
  • la gestion financière ;
  • le renforcement de la gestion pharmaceutique ;
  • l’amélioration de la satisfaction des patients ;
  • le renforcement du plateau technique ;
  • l’amélioration de la prise en charge des indigents ;
  • l’amélioration de l’hygiène et de l’assainissement.

 

Elle s’est traduite par :

  • des mesures d’ordre général de gestion ;
  • la gestion des ressources humaines ;
  • la gestion des recettes et des dépenses ;
  • la gestion des médicaments ;
  • le tout devant concourir à la satisfaction des patients.

 

2.1 – Management général

Trois comités ont été créés et/ou rendus opérationnels :

 

  • le comité de direction qui se réunit chaque lundi matin pour planifier les activités de la semaine ;
  • le comité de médicaments se réunit un jeudi sur deux  pour se pencher sur la disponibilité des médicaments et leur écoulement à la pharmacie ;
  • le comité d’hygiène et assainissement se réunit un vendredi sur deux pour se pencher sur la salubrité du centre.

 

Trois types de réunions sont organisées :

 

  • une réunion hebdomadaire des responsables de service pour la restitution et l’analyse des recettes et des dépenses, les activités menées au cours de la semaine précédente et le planning des activités pour la semaine en cours ;
  • une réunion mensuelle destinée à l’inventaire du magasin de la pharmacie ;
  • une réunion trimestrielle du COGES.

 

2.2 – Management des ressources humaines :

La réforme en matière de gestion  des ressources humaines a consisté en :

 

  • la mise en place d’un cahier de présence à l’entrée principale du centre et dans chaque service pour un suivi/contrôle de la présence effective du personnel au poste ;
  • l’élaboration des fiches de poste ;
  • la poursuite de l’élaboration du règlement intérieur ;
  • la mise en place d’un outil pour la planification des congés et des permissions ;
  • l’aménagement concerté, inclusif et consensuel de l’organigramme.

 

2.3 – Management des recettes et des dépenses :

L’un des principaux objectifs de ce projet est la rationalisation et l’optimisation des recettes afin d’assurer le bon fonctionnement du centre. Dans cette optique,  plusieurs actions et activités ont été menées :

 

  • amélioration du système d’encaissement et de management des recettes en attente de l’informatisation de la caisse et de la pharmacie ;
  • planification hebdomadaire et mensuelle des dépenses ;
  • mise en place d’un outil informatique à la pharmacie pour la gestion du stock et les inventaires quotidiens ;
  • mise en place des outils pour le rapprochement hebdomadaire entre les recettes et les activités de chaque service ;
  • sécurisation des recettes.

 

2.4 – Gestion des médicaments :

Les actions suivantes ont été menées afin de limiter les ruptures et de rendre disponible les médicaments essentiels :

 

  • opérationnalisation du comité de médicaments ;
  • élaboration d’un livret thérapeutique par ce comité afin de rationaliser le nombre et la quantité de produits à commander par molécule ;
  • établissement d’une liste de cinquante médicaments traceurs ;
  • implication de tous les acteurs (notamment des prescripteurs) dans le processus de commande ;
  • élaboration d’un document d’exploitation de la pharmacie ;
  • inventaire quotidien au point de vente de la pharmacie, et mensuel au magasin de la pharmacie ;
  • calcul et évaluation du taux de satisfaction des ordonnances.

 

Des émissions radiodiffusées dans cinq langues nationales ont été organisées pour informer la population sur la finalité  de la réforme. Ces émissions ont été précédées de séances de travail avec les autorités locales dont on a sollicité et obtenu l’adhésion selon une approche inclusive et participative.

 

Le suivi est assuré par :

  • la visite hebdomadaire du point focal contractualisation ;
  • la visite mensuelle du ministre de la santé.

Le suivi et la collecte des données serviront de base aux thèses de doctorat de deux étudiants en médecine.

 

L’évaluation de la contractualisation a reposé sur cinq indicateurs :

  • l’augmentation du taux de fréquentation ;
  • la réduction du taux d’évasion ;
  • l’augmentation des recettes propres ;
  • l’amélioration de la disponibilité des médicaments ;
  • l’amélioration du recouvrement des coûts.

 

3- Résultats

 

3.1 – Fréquentation :

Les taux des principales activités, comparés à ceux de l’année 2016 à la même période, sont donnés par les tableaux ci-dessous.

 

Juin 2017*

 

Juillet 2017*

 

Août 2017*

 

Septembre 2017*

 

Octobre 2017*

 

Consultations 1690 (-10,4%) 1009 (+5%) 1366 (+32%) 1275 (+40%) 1274 (+10%)

 

Hospitalisations 812 (+ 7,3%) 894 (+42%) 899 (+33%) 851 (-11%) 882 (-3%)

 

Chirurgie 197 (+ 7,1%)) 204 (+40%) 201 (+17%) 290 (+75%) 204 (+46%)

 

Laboratoires 4967 (+1,2%) 4988(+17%) 4981 (+4%) 5786 (+18%) 6223 (+4%)

 

Accouchements 71 (-11%) 158 (+86%) 138 (+60%) 163 (+73%) 206 (+137%)

 

Imagerie 772 (-1,3%) 753 (+10%) 871 (+11%) 819 (+15%) 953 (+26%)

 

*le  premier nombre indique le nombre de patients en 2017, et le nombre entre parenthèses l’écart en pourcentage par rapport au même mois en 2016

 

Juin, juillet, août, septembre, octobre 2016* Juin, juillet, août, septembre, octobre 2017*

 

Ecart en pourcentage*
Consultations 5944 6614 11,27%

 

Hospitalisations 3936 4338 10,21%

 

Chirurgie 808 1096 35,64%

 

Laboratoires 24807 26945 8,62%

 

Accouchements 432 736 70,37%

 

Imagerie médicale 3723 4168 11,95%

 

* les nombres mentionnés dans les deux premières colonnes indiquent le nombre de patients et ceux de la troisième colonne l’écart en pourcentage.

3.2 – Taux de disponibilité en produits pharmaceutiques

La disponibilité en produits pharmaceutiques, dont on ne dispose pas de données antérieures chiffrées, a été de 71%, 94% et 90% respectivement en août, septembre et octobre 2017 sur la base d’une liste prédéfinie de 52 produits traceurs.

 

3.3 – Taux de retard

Le taux de retard dont on ne dispose pas de données antérieures chiffrées, est passé de 12% en juin à 2,65% en octobre 2017.

 

3.4 – Taux d’évasion 

Le taux d’évasion, de 6% au premier semestre de 2017, est de 3,6% en octobre 2017.

 

3.5 – Taux de recouvrement

On ne dispose pas de données antérieures chiffrées relatives à ce taux qui est de 85% en octobre 2017.

 

4 – Recettes

L’évolution des recettes depuis la mise en œuvre de l’approche contractuelle est illustrée par le tableau et la figure ci-dessous.

 

  Actes Pharmacie Total

 

Recettes en FCFA

(écart par rapport à 2016, en %)

Recettes en FCFA

(écart par rapport à 2016, en %)

Recettes en FCFA

(écart par rapport à 2016, en %)

 

Juin 2017 15.241.470 (+ 19%) 14.356.465 (-10%) 29.597.935 (+3%)
Juillet 2017 16.595.485 (+26%) 17.664.510 (+19%) 34.259.995 (+22%)
Août 2017 17.889.900 (+23%) 22.871.601 (+47%) 40.761.501 (+35%)
Septembre  2017 16.849.245 (+23%) 24.586.915 (+67%) 41.436.160 (+46%)
Octobre 2017 18.959.547 (+26%) 29.314.165 (+112%) 48.273.712 (+67%)
Total des 5 mois 85.535.647 (+23%) 108.793.656 (+45%) 194.329.303 (+35%)

 

5 – Dépenses et enseignements tirés de la mise en oeuvre de l’approche contractuelle au CHU d’Atakpamé

 

Le fort engagement des plus hautes autorités a été déterminant dans la mise en oeuvre de la réforme. Il en a été de même de la démarche inclusive et participative qui a permis l’appropriation de la réforme par les différents acteurs. Le sens civique et l’attachement à la déontologie des agents qui ont priorisé le bien-être des malades sont à saluer.

 

L’augmentation des taux de fréquentation, de consultation et d’hospitalisation témoigne de la satisfaction des populations dont la désaffection pour les formations sanitaires est bien connue.

 

Toutes les recettes, à l’exception de celle de la pharmacie du mois de juin, ont subi une hausse. Le fort investissement en achat de médicaments a permis d’en augmenter les ventes, à la satisfaction des patients. Une des conséquences de l’augmentation des recettes a consisté au paiement régulier des salaires et des primes des agents émargeant sur le budget de l’hôpital. Une autre conséquence a été la réduction du découvert en banque, de 46 à 31 millions de francs. Les dépenses en achat de médicaments (93.189.579 FCFA, +66%) et en maintenance des équipements (3.228.675 FCFA, +841%) ont connu une hausse, contrairement à celles relatives au carburant (3.494.655 FCFA, -81%) et à l’aménagement de bureaux et de logements (168.400 FCFA, -98%), le tout illustrant la volonté d’axer les efforts sur les dépenses liées aux soins. Ce souci a été à la base des dépenses suivantes sur fonds propres :

 

  • achat de deux microscopes : 2.700.000 FCFA ;
  • achat de six ordinateurs de bureau : 2.965.000 FCFA ;
  • achat d’une table d’accouchement : 680.000 FCFA ;
  • achat de deux brancards : 1.369.500 FCFA ;
  • réhabilitation de la pharmacie : 5.588.226 FCFA.

 

Le mode de gestion induit par l’approche contractuelle a été associé à  l’aménagement du cadre, à travers le renforcement du ménage et la plantation d’une centaine d’arbustes. Ces mesures d’assainissement de gestion et de l’environnement sont accompagnées d’un renforcement des infrastructures et des équipements par l’Etat et ses partenaires. Elles ont d’ailleurs suscité récemment l’intérêt d’une mission du gouvernement israélien qui va procéder à l’extension du bloc opératoire et à la construction d’une unité de soins intensifs dans les prochains mois au CHR d’Atakpamé.

 

Cette fructueuse expérience de l’approche contractuelle au CHR d’Atakpamé accrédite les raisons qui l’ont motivée, et incite à son extension rapide aux autres formations sanitaires. C’est ainsi que trois autres entités seront l’objet de contractualisation dans les prochaines semaines : le CHU-SO, le CHU-Kara et le centre médico-social de Siou.

 

6 – Conclusions :

De cette riche expérience du CHR d’Atakpamé, les conclusions suivantes peuvent être tirées :

  • la contractualisation répond aux objectifs à elle assignés, centrés sur la satisfaction de la population ; en témoignent la hausse des taux de fréquentation et de consultation ;
  • elle valorise les différents acteurs, présents dans toutes les sphères de décisions relatives à la formation sanitaire ;
  • elle améliore les conditions de travail, à travers une amélioration du cadre, des équipements et des infrastructures ;
  • elle améliore les conditions de vie des agents à travers le paiement régulier des salaires et des primes ;
  • elle ne se solde pas par une réduction des ressources allouées par l’Etat ;
  • elle rationalise les dépenses issues des recettes par une approche holistique et inclusive ;

 

La consolidation et l’extension de la réforme (composantes de l’axe 5 de notre Plan National de Développement Sanitaire relatif au renforcement du système de santé, en prélude à la couverture sanitaire universelle), auront indéniablement un impact sur l’atteinte par notre pays de l’objectif 3 des ODD.

Bilan de cinq mois au CHR d’Atakpamé (Téléchargeable en .pdf)

Toutes nos félicitations à Mr le Ministre Moustafa MIJIYAWA et à tout le gouvernement pour cette approche très fructueuse.

 

 

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